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Un chat Beauté qui portait bien son nom

Publié le par Ulisitaladu "tous droits réservés"

Que les choses soient claires. Comme les chats nous avons plusieurs vies. Et entre chaque vie, nous avons tous des deuils à faire et souvent à affronter encore et encore l'abandon aux multiples versions, mais toujours ajoutées à la même blessure jamais cicatrisée.

Cette histoire est donc une histoire d'empathie. Si vous y voyez une projection de ma vie, je confirme. Mais je vous en voudrai un peu parce que je trouverai votre regard trop réducteur. Cette histoire est avant tout une histoire de chat .

Sous ma patte malhabile, j'ai du mal à garder mes griffes rentrées.

Et je porte dans le coeur et sur l'âme, le regard de Beauté qui me parle avant tout de tous les chats abandonnés et que j'ai  dû, contrainte , forcée, impuissante et déchirée ,abandonner à mon tour.

Beauté était une chatte dont je me souciais particulièrement car elle était souvent triste, plus que celà, blessée dans sa dignité de chatte royale , comme déchue d'un rang de matriarche qu'elle avait occupé, et elle en souffrait . J'ai fait sa connaissance dans une petite maison où elle était choyée et régnait sans partage sur quelques chats ayant comme elle un statut privilégié, à savoir vivre avec la maîtresse des lieux qui les avait recueillis.

Cent à deux cents chats abandonnés se partageaient un vaste enclos dans le refuge quand j'ai commencé à y travailler.

Et puis nous avons déménagé tout ce petit monde, un terrain plus grand, des chalets confortables, mais pour certains, celà a été assez traumatisant et le changement brutal.

Beauté a dû s'accommoder d'une vie différente, trouver sa place parmi  des chats qui avaient leurs habitudes territoriales de plus longue date, devenir une anonyme, une nouvelle fois ressentir le terrible abandon.

Alors elle attendait.

J'avais pris l'habitude de l'inviter à partager quelques minutes d'intimité  et quelques bouchées de mon sandwich quand je travaillais toute la journée. Les autres pensionnaires n'en  prenaient pas ombrage , les chats , et ceux-ci en particulier, respectent trop la liberté pour voir  une notion de privilège lorsque nous faisons un choix.

  Ils patientaient, sachant qu'ensuite ils pourraient à loisir renverser le café pris en leur compagnie à l'extérieur , et  qu'après ma cigarette venaient la pause câlins et le brossage.

Alors ils se présentaient à la queue leu-leu et Beauté attendait son tour, sagement, comme les autres.

  Mais parfois  elle restait bien trop à l'écart , signifiant ainsi  que ce jour-là, l'hommage rendu n'était décidemment  pas à la hauteur. Elle  semblait se draper dans sa beauté comme dans un manteau de solitude digne, et m'observait avec cette infime douleur dans le regard qu'ont les chats abandonnés quand ils ne sont plus qu'attente.

Combien de fois en m'affairant au ménage des chalets, suis-je retournée sur mes pas, appelée par un signe d'infime détresse, et c'était Beauté qui espèrait. Alors je la prenais dans mes bras et fièrement elle écoutait la chanson que je lui chantais: "Belle, c'est un mot inventé pour elle..."

Alors, Bambino venait réclamer la sienne, et puis Petit Bonheur, et puis Tutti Fruttti, et puis Mambo,et puis Pépito...

 

 

Beauté, mon invitée préférée...

Beauté, mon invitée préférée...

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